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L'ethnie minoritaire Co Tu des Hauts Plateaux du Centre Vietnam

Installés depuis des siècles dans les montagnes de la cordillère de Trường Sơn (Quảng Nam, Thừa Thiên Huế), les Cơ Tu comptent aujourd’hui environ 74 000 personnes. Proches des groupes môn-khmer, ils préservent une identité marquée par l’agriculture traditionnelle, le tissage, la vannerie et des fêtes rituelles riches en symboles. Leur maison commune, le Gươl, incarne l’esprit collectif d’un peuple qui demeure l’un des gardiens précieux du patrimoine culturel vietnamien.

Ethnie minoritaire Co Thu des hauts plateaux du centre Vietnam

Nom auto-désigné : Cơ Tu
Autres appellations : Ca Tu, Ka Tu
Population : environ 74 173 personnes (selon le recensement des 53 minorités ethniques du 1er avril 2019).

Langue

Les Cơ Tu parlent une langue appartenant au groupe môn-khmer (famille austroasiatique), proche de celles des Tà Ôi et des Bru – Vân Kiều. Leur écriture, créée avant 1975 à partir de l’alphabet latin, n’est aujourd’hui plus que rarement utilisée.

Histoire

Le peuple Cơ Tu réside depuis des siècles dans les régions montagneuses du nord-ouest de la province de Quảng Nam et du sud-ouest de Thừa Thiên Huế, à la frontière avec le Laos où vit également une partie de leur communauté. Ils figurent parmi les populations autochtones du massif de la cordillère de Trường Sơn – Hauts Plateaux du Centre, une zone riche en traditions et en diversité culturelle.

Activités de production

L’agriculture sur brûlis constitue l’activité principale des Cơ Tu. Leur mode de culture repose sur un processus traditionnel : abattage des arbres à la hache et à la machette, brûlis des parcelles, puis semis à l’aide d’un bâton pour percer la terre. Le désherbage est effectué avec un outil à lame de fer recourbée, tandis que le battage du riz se fait encore à la main. Les champs sont exploités en polyculture et cultures associées, puis laissés en jachère après quelques récoltes, avant d’être de nouveau cultivés. Chaque année, les Cơ Tu ne pratiquent généralement qu’une seule récolte.

Élevage et ressources alimentaires : Les animaux domestiques les plus courants sont les buffles, porcs, chiens et volailles. Toutefois, l’alimentation quotidienne provient en grande partie de la cueillette, de la chasse et de la pêche, qui complètent les produits agricoles.

Artisanat et échanges: L’artisanat reste modeste mais symbolique : le tissage et la poterie en terre cuite sont pratiqués dans certaines zones proches de la frontière vietnamo-laotienne, tandis que le vannerie et la sparterie (fabrication d’objets en bambou et en rotin) sont largement répandues. L’économie marchande demeure limitée et les échanges de biens par troc sont encore couramment utilisés aujourd’hui.

Moyens de transport

Chez les Cơ Tu, l’outil de transport le plus courant est la hotte dorsale (gùi), portée grâce à deux bretelles fixées sur les épaules. On distingue plusieurs types : des hottes à maillage serré, d’autres plus ajourées, adaptées à différents usages et tailles. Les hommes possèdent un modèle particulier, appelé « gùi à trois compartiments » ou gùi « ailes de chauve-souris », conçu pour transporter divers objets de manière organisée.

Alimentation

Dans la vie quotidienne, les Cơ Tu consomment principalement du riz ordinaire (cơm tẻ), tandis que lors des fêtes et cérémonies, le riz gluant (cơm nếp) occupe une place centrale. Le repas à la main reste une coutume ancestrale. Leur cuisine se caractérise par des plats grillés, marinés ou cuits dans des tubes de bambou, méthode traditionnelle qui confère aux mets des saveurs uniques.

Ils boivent traditionnellement de l’eau de source (aujourd’hui souvent remplacée par de l’eau bouillie) ainsi que diverses boissons alcoolisées : vin de canne à sucre, rượu tà-vạk (fermenté à partir d’une plante de la famille des palmiers), mais aussi des alcools préparés à base de riz ou de manioc. Le tabac est consommé à l’aide de pipes en bois ou en bambou.

Vêtements traditionnels

Les Cơ Tu affectionnent particulièrement les tenues en tissu tissé noir, ornées de motifs réalisés au plomb ou de perles blanches.

Hommes : ils portent le pagne (khố) et vont souvent torse nu.

Femmes : elles revêtent la jupe-tube. Lorsqu’elle est longue, elle couvre le corps de la poitrine aux pieds ; si elle est courte, elle est associée à un haut sans manches. Lors des fêtes et cérémonies, les femmes agrémentent leur tenue d’une ceinture de tissu blanc sobre et élégante.
Les grands morceaux de tissu servent quant à eux de châle, de couverture ou de drap.
Cette parure simple mais raffinée traduit un attachement fort aux traditions, tout en mettant en valeur l’esthétique sobre et symbolique des Cơ Tu.

Habitat

Les Cơ Tu vivent principalement dans les districts de Hiên et Giằng (province de Quảng Nam), ainsi que dans les districts de Phú Lộc et A Lưới (province de Thừa Thiên Huế).

Leur habitat traditionnel est la maison sur pilotis, reconnaissable à son toit recourbé aux deux extrémités, évoquant la carapace d’une tortue. Les pignons sont surmontés d’un ornement de bois sculpté appelé khau cút, de forme simple.
Autrefois, une maison abritait plusieurs couples mariés ainsi que leurs filles, regroupant généralement les familles de frères d’une même lignée. Dans les villages, les habitations sont disposées en cercle autour d’un espace central.

Chaque communauté possède une maison commune appelée Gươl, bâtisse la plus haute et la plus belle du village. Le Gươl joue un rôle essentiel : il est le lieu des réunions, fêtes communautaires, cérémonies rituelles et décisions collectives. Véritable symbole identitaire, il incarne l’âme et la cohésion du village Cơ Tu.

Relations sociales

Chez les Cơ Tu, les liens communautaires au sein du village sont très forts. Le village constitue l’unité résidentielle et sociale fondamentale, occupant un territoire défini et autonome, régi par les coutumes ancestrales. À sa tête se trouve le « già làng » (ancien du village), figure respectée qui incarne l’autorité morale et veille au respect des traditions.

La société Cơ Tu ne connaît pas de grandes distinctions sociales. La richesse se mesure traditionnellement par la possession de gongs et jarres de cérémonie, de buffles, de parures et de tissus.

Mariage et coutumes nuptiales

Le mariage occupe une place importante dans la vie sociale. La famille du marié doit offrir des biens précieux à la famille de la future épouse et prendre en charge l’organisation des noces. Le processus matrimonial suit plusieurs étapes codifiées :

la demande en mariage (hỏi),
les fiançailles (đính hôn),
la *cérémonie de mariage,
puis, dans les familles aisées, un second mariage symbolique, organisé plus tard pour affirmer le statut social.
Certaines pratiques coutumières sont caractéristiques :
L’union préférentielle entre le fils d’une sœur et la fille d’un frère maternel (mariage croisé).
Le remariage des veuves avec le frère ou l’oncle du défunt, afin de préserver la cohésion familiale.

Les règles d’alliance unilatérale : si la maison A a donné sa fille à la maison B, cette dernière ne peut pas, en retour, donner sa propre fille à la maison

Autrefois, parmi les familles riches et influentes, la coutume spectaculaire du « rapt de la mariée » (cướp vợ) pouvait encore être pratiquée

Naissance et maternité

Chez les Cơ Tu, la naissance suit des pratiques traditionnelles profondément ancrées. La femme accouche soit dans une hutte provisoire construite derrière la maison, soit à même le sol, près du foyer central, symbole de chaleur et de vie, entourée de quelques femmes du village venues l’assister.
Le placenta est ensuite placé dans une calebasse ou enveloppé de tissu et de feuilles de bananier, avant d’être enterré derrière la maison, selon un rituel protecteur.

La mère reprend généralement le travail après seulement trois à quatre jours, ou au bout d’une semaine, preuve de la rudesse du mode de vie. Ce n’est qu’au bout de plusieurs mois que l’on donne officiellement un nom à l’enfant, après des rites de bienvenue et d’intégration à la communauté.
Funérailles et culte des ancêtres

Chez les Cơ Tu, les rites funéraires témoignent d’un profond respect pour les défunts et d’une riche symbolique spirituelle. Le cercueil est généralement un tronc d’arbre creusé dans une essence de bois noble. Selon les coutumes, il peut être enterré et recouvert de terre, ou au contraire laissé apparent, sans être totalement enseveli.

Dans les familles aisées, le corps du défunt est veillé plus longuement ; les cérémonies funéraires deviennent alors de véritables événements communautaires. Elles incluent souvent le sacrifice d’un buffle, animal prestigieux, et la construction d’une maison funéraire richement décorée. Celle-ci, en bois sculpté et peint, arbore de nombreux motifs symboliques.

Une coutume particulière, appelée « dồn mồ » (regroupement des tombes), consiste à exhumer les ossements quelques années après l’inhumation, une fois la famille suffisamment prospère, pour organiser une grande cérémonie collective avec l’ensemble des lignées du village.

Culte et croyances

La vie religieuse des Cơ Tu est intimement liée à la nature, à la santé et aux cycles de production agricole. Les rituels se déclinent en différentes échelles :

Petits sacrifices : une poule, voire un simple œuf.
Rituels plus importants : un porc.
Grandes cérémonies : un buffle, considéré comme l’offrande la plus prestigieuse.

Autrefois : le sang humain était perçu comme le sacrifice suprême, garantissant le lien direct avec les puissances invisibles.
Le sang des animaux immolés est jugé essentiel pour communiquer avec le monde surnaturel et assurer la protection de la communauté.
Chaque village conserve également un objet sacré – le plus souvent une pierre – gardé dans la maison commune (Gươl) et considéré comme un talisman protecteur. Certains individus possèdent aussi leur propre amulette, censée leur apporter force et protection.

Fêtes traditionnelles

La plus grande cérémonie des Cơ Tu est le sacrifice du buffle (lễ đâm trâu), organisé à l’échelle du village ou d’une famille. Une autre fête importante est le rituel du regroupement des tombes (lễ dồn mồ).

Les Cơ Tu célèbrent également leur propre fête du Tết, qui a lieu traditionnellement en janvier ou février, après la récolte du riz. Les festivités débutent par des offrandes dans les foyers et dans la maison commune (Gươl), suivies de repas collectifs et de moments de convivialité partagés avec les invités. Aujourd’hui, dans de nombreuses régions, ces célébrations se tiennent en même temps que le Tết Nguyên Đán (Nouvel An lunaire).

Calendrier et croyances populaires

Le calendrier Cơ Tu est basé sur les cycles lunaires : les jours du mois sont nommés en fonction des phases de la lune, si bien que certains portent le même nom. Chaque jour est associé à des présages et usages spécifiques, selon la sagesse populaire : tel jour est favorable à la plantation de manioc ou de patates douces, tel autre à celle des piments ou des aubergines, ou encore à l’édification d’une maison et à la célébration d’un mariage.

Vie artistique et artisanat

La culture des Cơ Tu est riche en contes traditionnels, relatant l’origine des lignées, des légendes sur la création du monde ou encore des récits de la vie sociale.

Lors des fêtes, la communauté se réunit autour de danses collectives : les femmes exécutent la danse Dạ dạ, tandis que les hommes interprètent la danse Ting tung. Ces moments festifs sont accompagnés de musique jouée sur des instruments traditionnels : un ensemble de trois gongs, un grand gong unique, des tambours, des flûtes, ainsi que des luths et vielles locales.

Les femmes excellent dans le tissage de textiles ornés de motifs géométriques raffinés, enrichis de fils colorés, de perles ou de décorations au plomb.
Les hommes, quant à eux, se distinguent par leur talent dans la sculpture décorative, que l’on retrouve sur les maisons funéraires et communautaires, avec des représentations de têtes de buffles, d’oiseaux, de serpents, d’animaux sauvages ou de coqs. Ils peignent également des motifs sur les poteaux auxquels est attaché le buffle sacrifié.

Enfin, les Cơ Tu possèdent un répertoire de chants traditionnels propres, transmis oralement, qui accompagnent la vie quotidienne et les cérémonies.
À travers leur mode de vie, leurs croyances et leurs arts, les Cơ Tu incarnent l’âme des montagnes du Trường Sơn. Leur attachement à la nature, à la communauté et aux traditions fait d’eux les gardiens d’un patrimoine immatériel rare et précieux. Dans un Vietnam en pleine modernisation, leur culture reste un témoignage vivant de la richesse et de la diversité des peuples qui composent le pays.